Michel Gauthier

Cette monographie retrace la trajectoire remarquable de l’œuvre de Jean Degottex (1918-1988) : sur près de quatre décennies, sa peinture évolue de l’abstraction lyrique, dont il fut l’une des figures majeures, vers un radicalisme analytique et processuel, la rapprochant de l’avant-garde picturale qui émerge à la fin des années 1960 et s’affirme au cours de la décennie suivante. En 1955, la peinture de Degottex devient une question pour André Breton, qui y voit une possible issue abstraite à l’automatisme pictural. Cette tentative d’affiliation de l’abstraction lyrique au surréalisme se réalise par l’inscription du travail de Degottex dans un rapport à l’Extrême-Orient et au bouddhisme zen, ce qui lui permet paradoxalement de dépasser la conception expressive de l’abstraction lyrique au profit d’une peinture des signes et de l’écriture. Ainsi affranchie, à partir du milieu des années 1960, des esthétiques qui l’ont vue naître, la peinture de Degottex se voit animée par un tropisme d’abord centrifuge, aux accents spatialistes, puis centripète, autoréflexif ; elle se consacre alors à l’expérimentation sensible de ses constituants élémentaires. L’ouvrage de Michel Gauthier détaille les étapes de ce mouvement, des plus hauts accomplissements du lyrisme informel au matérialisme pictural des séries qui marquent les quinze dernières années de production, d’une peinture qui exprime à une peinture qui s’exprime, et tente d’en dégager la logique profonde.